Contrairement
à ce quon peut penser, le fado nest pas vraiment une
musique dorigine populaire généralisée. Cest
plutôt de la chanson urbaine, cultivée surtout à Lisbonne,
la capitale du Portugal, par les couches populaires et par laristocratie.
Pus tard, il est adopté à Coimbra, la ville universitaire,
par les étudiants. Habituellement, le fado est considéré
comme la chanson nationale portugaise.
Malgré
lexistence dune certaine variété de genres de
fado, il nest pas une chanson régionale. Pendant des siècles,
le fado a acquis des influences arabes dans les mélodies et dans
les poèmes qui lui ont permis de devenir lidentité
daujourdhui : un chant mélancolique et nostalgique
. Il semble que le fado est un produit dascendance coloniale, dorigine
afro-brésilienne et ses racines sont liées au lundum du
Brésil (un chant triste et lent des esclaves). Amené au
pays par les marins portugais, le fado est le mélange du lundum
avec les chants dorigine arabe qui perduraient encore dans certains
quartiers de Lisbonne, tels que Alfama, Mouraria (quartier des Maures)
et Bairro Alto.
Au début,
le fado était chanté dans les tavernes mais vers le milieu
du XIXe siècle, il atteignit laristocratie. Le Comte de Vimioso,
en1868, emmena Severa, la grande artiste du fado de lépoque,
dans les palaces. Elle a marqué cette période et son nom
est devenu un mythe du fado. Severa apparut par la suite comme la référence
et la grande responsable de la promotion du fado, surtout dans le milieu
de la noblesse.
À
Coimbra, un autre mythe du fado se nomme Hilário et il fit ses
preuves vers la deuxième moitié du XIXe siècle. Ici,
malgré la tristesse quil représente, le fado est chanté
par des groupes détudiants qui chantent des sérénades,
créant un côté spirituel au fado, ce qui le différentie
du fado de Lisbonne. Dans la deuxième moitié du XXe siècle,
le fado de Coimbra a été utilisé par des étudiants
comme une forme de contestation politique et sociale. À Coimbra,
la « guitarra » (guitare) est jouée plus
lentement et le son est plus rond et grave.
Les instruments
utilisés pour accompagner les « fadistas »
(ceux qui chantent le fado) sont la « viola » et
la « guitarra ». La « viola »
est presque une guitare classique. Cest un instrument de six cordes
dérivé de la « vielle » du Moyen Âge.
Elle sert surtout à marquer le rythme de la musique. Maintenant,
quand on parle de « guitarra », on parle de la guitare
nationale portugaise : « la Portugaise », un
instrument de 12 cordes que certains auteurs croient être dorigine
arabe, dérivé du « luth » (instrument
de 7, 13 ou 21 cordes en forme de demi-poire, du XVIe - XVIIe siècles)
tandis que dautres parlent plutôt de son origine anglaise
(la guitare anglaise, à son tour, est dorigine médiévale).
Nous savons quelle a souffert quelques adaptations pendant de longues
années, pour devenir le produit que nous avons de nos jours :
un instrument de cordes typiquement portugais. Les arrangements et la
guitare de 1795 divergent de celle
daujourdhui.
La « guitarra » sert à faire les mélodies
qui accompagnent le ou la « fadista ».
Depuis
lavènement de la radio et surtout après les années
60, le fado a pris de nouveaux envols allant jusquà sortir
des frontières nationales. La grande responsable de cette explosion
du fado est la chanteuse Amália Rodrigues, la « fadista »
par excellence du pays. Sa voix exceptionnelle sest imposée
dès son jeune âge quand elle vendait des fruits au marché.
Elle est devenue la référence du fado, étant présentement
considérée comme un symbole et un mythe de la musique portugaise.
À sa mort en 1999, le gouvernement portugais a décrété
un deuil national pendant trois jours et son corps repose aujourdhui
à côté des rois et des héros nationaux du Portugal
à Lisbonne.
Aujourdhui,
écouter ou chanter le fado, dans son ambiance appropriée
est une occasion de fête. Pour une « noite de fado »
(nuit de fado), on se prépare à aller à une soirée
spéciale et on shabille avec élégance. Un souper
typiquement portugais est presque toujours au menu et figure le « bacalhau »
(morue), le « caldo verde » (soupe aux légumes
verts) et le « chouriço » (saucisse portugaise)
flambé.
Pour
bien écouter, comprendre et sentir lesprit du fado, deux
conditions sont essentielles. La première est le silence absolu.
La deuxième est la lumière. Il est important de tamiser
la lumière au plus bas ou encore mieux, de nutiliser que
des chandelles sur les tables. Cela fera ressortir encore plus la musique
de la « viola », de la « guitarra »
et surtout, la voix des « fadistas ». Aussi, de
cette façon, on gardera lintimité de la soirée.
Dans
la majorité des grandes villes du monde, on peut écouter
le fado dans un bon restaurant portugais. À Montréal, nous
sommes particulièrement privilégiés, car nous pouvons
apprécier plusieurs « fadistas », hommes
et femmes, de talent exceptionnel, dans les restaurants et les salles
communautaires portugaises.
Sources :
Enciclopédia,
Volume I, « Section Fado », Publications Diário
de Noticias, (Lisbonne, 1996-1997).
Carlos Edgard, As Vozes da Orquestra (Les Voix de lOrchestre), Ministère
de lÉducation Nationale, (Lisbonne, 1974).
Armando Leça, Música Popular Portuguesa (Musique Populaire
Portugaise), Collection Folklore et Pédagogie, (Porto, 1942).
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