Eça
de Queirós : un portrait
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À Paris, le 16 août 1900, séteignait lécrivain portugais José Maria Eça de Queirós. Cinquante-quatre ans sétaient passés depuis sa naissance, quelques mois depuis le début de sa tuberculose et dix ans manquaient encore avant linstitution de la République au Portugal. Cette République avait été appelée de tous ses vux par la « Génération de 70 », trente ans plus tôt. Elle arriva dix ans trop tard. Pourtant, Ramalho Ortigão, grand ami dEça, put lobserver pendant cinq ans, avant de suivre celui-ci dans la tombe.
Par
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Eça de Queirós |
Ortigão et Eça de Queirós sétaient associés au groupe de la « Génération de 70 » dans les années où ils commencèrent à publier un mensuel satyrique, As Farpas. Ce groupe prônait dimportantes réformes sur les plans social et artistique. Bien quils se disent désillusionnés, ces jeunes hommes aimaient la vie, attendaient la République. Qui vint trop tard pour certains dentre eux. Mais les écrits de lécrivain demeurèrent intimement et profondément liés à sa société, malgré son attente déçue. Auteur de plusieurs romans et nouvelles mettant en scène des personnages portugais aux prises avec eux-mêmes et leur société, Eça de Queirós écrivit le plus souvent sous les auspices du naturalisme et du réalisme. Sa cible préférée était la société portugaise, quil dénonçait, ainsi que son hypocrisie religieuse. Son ironie était mordante et na jamais raté sa cible. Sa plume féconde fut saluée des plus grands : Émile Zola, qui le disait plus grand que Flaubert, et Jorge Luis Borges, qui parlait simplement de lui comme le plus grand. Paradoxalement, ce peintre de la vie sociale portugaise passa le plus clair de sa vie éloigné de son sujet. Mais nest-ce pas là lun des plus grands principes scientifiques, pourrait-on objecter ? En effet, avant déchouer sur les côtes françaises, il eu une carrière de diplomate dans de nombreux pays du globe. Il vit La Havane, lAngleterre, New York, lÉgypte et le Proche Orient, et même Montréal. La tentation de tous ces univers demeura toujours teinté dune mélancolie, celle de lexil, éternelle « saudade ». La prolixité de sa plume ne se démentit jamais. Le dernier souffle littéraire dEça de Queirós donna à ses lecteurs A ilustre Casa de Ramires, A correspondência de Fradique Mendes et A cidade e as Serras, publiés de façon posthume. Il écrivait comme on court, debout, jetant à mesure les feuillets au sol, dans un automne exubérant et lyrique. En se penchant sur ce lac de papier, on peut ramasser quelques titres au hasard, qui désignent des romans-fleuve, interminables et touffus. Os Maias (1880), O Mandarim (1888), A Relíquia (1887), O Crime de Padre Amaro (1875) sont les plus connus. Son esprit perfectionniste le conduisit non seulement à peindre la société mais aussi son milieu. Ainsi, plusieurs centaines de mets, près dun millier de vins, tous différents, sont mentionnés dans ses uvres. Certains sont disparus aujourdhui, victimes gastronomiques dune industrialisation débridée. Peut-on lui reprocher quelque chose, lorsquaujourdhui, plus dun siècle après sa mort, on considère ses portraits, sa moustache en bataille, son demi sourire un peu arrogant? Lacune ou reflet, les personnages féminins du romancier portugais manquent de profondeur. Stéréotypées, les femmes nont souvent quun rôle de faire-valoir face aux viriles angoisses de leurs vis-à-vis Peut-être est-ce là ce qui manque à la comédie humaine qua entrepris de décrire Eça de Queirós |