a donne la parole à Résistencia
Le lundi 24 mars 2003
AU PORTUGAL, LA SITUATION
DU CINEMA EST GRAVISSIME !
Merci de lire la déclaration
suivante et si vous en êtes d'accord, de la signer en écrivant
un mail avec votre nom, profession, ville (et si possible un contact)
à: resistencia@oninetspeed.pt
Cela fait chaud au coeur
de penser qu'il est un pays d'Europe où l'on fait encore beaucoup
de films cousus main. Des films à penser, à ressentir,
comme ceux de Manoel de Oliveira, Paulo Rocha, Abi Feijo, João
César Monteiro, João Botelho, Pedro Costa, ou auparavant
António Reis, et bien d'autres dont l'oeuvre est parfois moins
connue mais non moins essentielle pour que le monde des idées
et des émotions continue de tourner.
Aujourd'hui, au Portugal, le dispositif qui permettait à ces
films d'exister est menacé de disparaître au profit d'une
vue \"purement\" mercantile du cinéma.
Nous tenons à faire savoir notre tristesse et notre révolte
devant de telles perspectives
------
Depuis des mois, une nouvelle
loi du cinéma est en cours de rédaction au Portugal sans
qu'il soit possible d'en connaître la teneur autrement que par
des rumeurs, des idées générales dans les déclarations
des responsables politiques et d'en soupçonner l'orientation
par le contexte qui affecte actuellement tout le domaine culturel au
Portugal.
Savoir quelque chose sur
le nouveau "dispositif" est l'un des problèmes actuels
et le "secret" qui entoure son élaboration et son contenu
l'un des motifs majeurs de préoccupation.
Il avait pourtant été
annoncé que le projet de loi serait accessible à tous
afin que les professionnels puissent faire part de leurs remarques et
suggestions sur le texte. A ce jour, aucun projet de texte n'est accessible
alors qu'il est question que la nouvelle loi soit présentée
au Parlement d'ici deux mois !
Les rumeurs les plus "étranges"
et inquiétantes circulent. La plus persistante est la fin des
appuis financiers aux projets individuels et l'attribution de "package",
sous forme de contrats-programmes passé
avec les sociétés de production, la suppression des appuis
spécifiques aux premières et deuxièmes oeuvres,
l'objectif de diminuer le nombre de longs-métrages produits afin
de favoriser des productions au budget plus lourd susceptibles de concurrencer
les films étrangers (?!)
La manière dont
ont été organisées les dernières attributions
de subvention prévues au calendrier de l'année 2002, laisse
craindre le pire. Le concours pour l'aide sélective à
la production de long-métrage où, par réglementation
officielle, devait être attribué une aide à trois
films, a été ouvert il y a quelques jours, ne prévoyant
l'attribution d'une aide que pour un seul film.
Le concours prévu
pour les premières et deuxièmes oeuvres, lui aussi officiellement
annoncé en début d'année, lui aussi ayant fait
l'objet d'une dotation budgétaire, a été purement
et simplement supprimé. Avec cette situation aggravante que le
règlement du concours d'aide sélective à la production
de long-métrage mentionné plus haut, interdit la présentation
d'une première ou deuxième oeuvre.
Quant au documentaire,
si le concours prévu a bien été ouvert mais le
nombre de projets appuyé amputé d'un tiers et personne
ne se fait la moindre idée des orientations de la nouvelle loi
à ce sujet. Alors qu'au Portugal, la
nécessité d'une aide au documentaire de création,
si longue à faire accepter, commençait peut-être
à porter ses fruits.
Il faut aussi savoir qu'en
janvier 2003, toute perspective de production est stoppée puisque
aucun nouveau concours ou aides de quelque sorte qu'elle soit ne seront
annoncés avant le vote et la promulgation de la nouvelle loi.
L'annonce de cette nouvelle
loi se fait simultanément avec une refonte complète de
la structure de la télévision publique. Après avoir
annoncé la suppression du second canal de la RTP (par ailleurs
quasiment le seul qui
diffuse le cinéma portugais, de longs comme de court-métrage
et de documentaire, en tout cas le cinéma comme celui de Manoel
de Oliveira, Paulo Rocha, João César Monteiro, João
Botelho, Pedro Costa, etc
mais aussi les
cinéastes étrangers de Kaurismaki à Godard en passant
par Kiarostami), le gouvernement parle maintenant de le remettre à
la "société civile" (?!) sans que personne ne
sache de quoi il s'agit.
Parallèlement une
série de "crises" a ébranlé violemment
le cinéma portugais durant l'année 2002. L'ICAM (Institut
du Cinéma, Audiovisuel et Multimédia) organisme qui gère
notamment les subventions qui permettent au cinéma portugais
d'exister, est entré dans une crise financière consécutive
au non-reversement par les chaînes de télévision
- privées comme publiques, de la taxe sur la publicité
qui finance l'ICAM et que les sociétés de
télévision sont chargées de collecter en son nom.
Le non-reversement - illégal - de cette taxe a duré des
mois amenant l'ICAM dans une situation d'incapacité de remplir
ses engagements contractuels tant vis-à-vis des
producteurs que distributeurs ou des réalisateurs ayant obtenus
une aide à l'écriture. En un mot les appuis financiers
accordés par concours et jury, ayant fait l'objet d'un contrat
n'ont pu être versés.
Le texte de sensibilisation
qui circule actuellement a pour objet de permettre de s'associer à
l'inquiétude des cinéastes portugais, de leur apporter
un soutien, et de faire savoir, que, hors des frontières du Portugal,
il existe des êtres humains qui s'intéressent et aiment
le cinéma qui se produit au Portugal, "ce cinéma
avec lequel il faut en finir puisque les Portugais ne veulent pas le
voir" comme l'a dit un responsable politique.